Mme Duchesne* est au stade modéré de la maladie d’Alzheimer et se comporte de manière quelque peu contrôlante, insistant sur le fait qu’elle peut faire des choses qu’elle ne devrait vraiment plus faire. Mais elle est catégorique. Elle déclare avec défi :
« Oui, je peux charger le lave-vaisselle. » Cependant, cela n’est pas acceptable pour M. Duchesne*. Il est alors à bout de nerfs , stressé et irrité la plupart du temps.
Après 54 ans de mariage, le couple avait besoin d’aide. La relation était fragilisée par la nouvelle réalité de Mme Duchesne, ce qui a créé un impact négatif sur les deux protagonistes. Ils ont alors fait appel à un coach formé et expérimenté dans la méthode Montessori adaptée aux personnes avec des problèmes cognitifs.
Après quelques observations et quelques questions, il était clair qu’une nouvelle approche réduirait une grande partie du stress dans la relation. L’entraîneur a expliqué que Mme Duchesne essayait de tout contrôler parce qu’elle était très consciente qu’elle perdait en fait le contrôle. C’était sa réalité.
Son mari avait été formé auparavant pour accompagner sa femme et lui prodiguer les soins physiques de façon admirable cependant, il n’avait pas encore accepté sa réalité.
Par exemple, le couple a deux enfants adultes qui vivent assez loin de leur demeure. Leur mère est naturellement très attachée à eux et est attristée parce qu’elle ne les voit pas souvent. Généralement, lorsqu’elle met la table, elle ajoute des couverts supplémentaires pour ses enfants. Elle parle d’eux ou bien, elle leur parle directement comme s’ils étaient vraiment là dans la pièce. Elle aime ça car elle sent ainsi leur présence.
Malheureusement, son mari continue d’être dans le déni et s’énerve chaque fois devant elle dû à ce comportement. Il lui rappelle continuellement que les enfants ne sont pas avec eux à la table. Il répète encore et encore où ils vivent et qu’ils ne les visitent pas en ce moment. Mais cela ne fait qu’aggraver la situation. Bien sûr, le comportement de monsieur n’arrange pas les choses parce que dans sa réalité, Mme Duchesne en a besoin et donc pour elle, ils sont là. Elle ne comprend pas (et ne le peut pas) pourquoi il insiste sur le fait que les enfants ne sont pas là. On peut ainsi comprendre d’où viennent le stress et l’irritabilité.
L’entraîneur a dit à M. Duchesne de laisser faire son épouse et de se joindre plutôt à la conversation sur les enfants. Seulement, l’accompagner dans sa réalité plutôt que d’y résister. Ainsi, lorsque Mme Duchesne a commencé à parler aux enfants au repas, même s’ils n’étaient pas là, son mari lui a plutôt posé des questions sur les choses qu’ils avaient l’habitude de faire ensemble avec les enfants, et il a évoqué de vieux souvenirs qu’ils partageaient. Quand on y pense, ça sonne comme une belle heure de dîner, se remémorer avec joie l’ancien temps où les enfants étaient petits et toutes les choses mignonnes qu’ils faisaient.
Se souvenir de vos proches et des moments heureux que vous avez passés ensemble est une chose positive pour tout le monde ; c’est quelque chose qui peut faire sourire n’importe qui – avec ou sans problèmes de mémoire.
Pour en revenir à l’histoire, le premier commentaire de M. Duchesne a été
« WOW ». Il ne pouvait pas croire à quel point cela s’était bien passé. Apparemment, M. Duchesne appréciait l’échange autant que sa femme. Il a rapporté que la soirée a été très agréable et que l’approche avait fonctionné comme un charme.
Pour résumer, sa femme avait clairement des besoins non satisfaits. Elle avait besoin de mettre la table pour inclure ses enfants et elle avait aussi besoin de parler avec eux et à leur sujet. Tant que son mari niait sa réalité, leur communication était vouée à la discorde. Une fois que son mari a rencontré sa femme dans sa réalité, il a trouvé la vie beaucoup moins stressante et plus positive dans l’ensemble. Leur relation devint plus harmonieuse parce que, premièrement, M. Duchesne a accepté la réalité de sa femme et deuxièmement, Mme Duchesne n’a plus de besoins non satisfaits.
* Noms fictifs